Jeudi 29 août 2024, 10h26, Hanbury Street, Whitechapel, Londres. Entre Brick Lane et Spital Street. Quartier historiquement misérable. En partie touché aujourd’hui par une gentrification.
Attacher (La vie des objets. Ch. 174)
Jeudi 29 août 2024, 10h, station Angel, Islington, Londres. L’objet est le logo des transports publics londoniens, cercle rouge vif barré d’un nom en blanc sur fond bleu sombre, dans la célèbre typographie d’Edward Johnston, qui a lui-même défini ce logo, de 1913 à 1916. Le reproduire pour le documenter serait peu au regard de sa rencontre dans les profondeurs du Tube. Bien plus que le lire, et la collection de ses noms propres s’identifie résolument, le fréquenter, le voir vivre, le vivre, est la façon première de s’attacher à des lieux, à des trajectoires, aux mailles de la ville.
Fournier Street
Jeudi 29 août 2024, 9h, Fournier Street, East End, Londres. Il y a dix ans, on avait déjà remarqué — et photographié –, ces portes symétriques : https://jlggb.net/blog4/?p=1896. On voulait voir le quartier de Spitalfields et de Brick Lane. On avait retenu ce nom français. Internet abonde en informations, y compris pour raconter comment les maisons géorgiennes de cette rue ont été achetées et rénovées depuis une quarantaine d’années, peut-être comme ce que l’on a connu à Paris dans le faubourg Saint-Antoine, mais avec plus d’authenticité. Des artistes y ont installé leurs ateliers, à commencer par Gilbert & George. « Spitalfields’ historic association with the silk industry was established by French Protestant refugees who settled in this area after the Revocation of the Edict of Nantes in 1685. The Huguenots brought with them little, apart from their skills ». Fournier est le nom de l’un d’eux, riche, qui participa à la construction de la rue, dans les années 1720. Au-dessus, les deux étages ont de vastes fenêtres pour les ateliers. Avec le déclin de l’industrie de la soie au 19e siècle, le quartier devient celui d’une grande communauté juive. Au bout de la rue, la Neuve Eglise de 1743 est transformée en Synagogue en 1898, puis en Grande Mosquée dans les années 1970. La plaque de rue porte sa transcription en bengali.
Charing Cross (Atlas du gobelet)
Fines tiges d’acier croisées en carré, fil de nylon vert tressé en cercle
À écouter
Mercredi 28 août 2024, 12h, Tate Modern, Londres. La grand rétrospective « Yoko Ono. Music of the Mind » s’ouvre sur ce qui est peut-être la pièce la plus simple et la plus convaincante : Telephone Piece, 1964. À intervalles réguliers, un téléphone sonne six fois, est décroché, « Hello. This is Yoko », est raccroché. Ensuite c’est la même chose avec « Moshi Moshi. Yoko desu ».
Vernaculaire
Mercredi 28 août 2024, 11h, Clerkenwell Road, Londres. Où l’on vérifie qu’aller en marchant donne à voir vraiment. Tout au moins ce qui est remarquable. Dressés dans le tournant en pente de la rue, le jaune ordonné d’une devanture, l’enveloppe courbée, souple et verticale, d’un immeuble de brique, modeste, élégant, moderne d’avant et toujours moderne.
Une petite poupée du Japon
Samedi 24 août 2024, 16h15, musée d’Ennery, avenue Foch, Paris, 16e. Elle n’était pas pour jouer mais pour célébrer la fête des enfants. L’étiquette surprend, surtout dans les circonstances françaises actuelles. On doit savoir que, dans la hiérarchie du gouvernement japonais, il y avait, avec l’empereur au centre, le ministre de gauche d’abord, puis le ministre de droite. Ce musée en est un parce que Madame d’Ennery, à la fin du 19e siècle, a voulu faire aboutir, sous ce nom, sa passion particulière des collections d’objets chinois et japonais. Ici, aujourd’hui, 7000 pièces, presque exclusivement des figures animales et humaines, achetées, sans jamais voyager ni étudier, souvent par lots, chez des antiquaires, au Bon Marché. Ce musée unique parle avant tout de la façon dont de riches familles parisiennes, proches du pouvoir, firent la promotion des chinoiseries et des japonaiseries.
Monument antinationaliste
Vendredi 23 août 2024, 12h, Paris. Revendiqué par la Suisse comme par la France, l’emmental pourrait échapper à cette forme de nationalisme, parmi tant d’autres, en reconnaissant, comme dans ce projet de monument, la puissance et la beauté d’une coexistence du vide et du plein. NOTES : 1. On sait maintenant que les trous viennent des gaz générés lors de la fermentation par des particules de foin infiltrées dans le lait des vaches. 2. Le morceau ici présent vient d’Étaux, Haute-Savoie, où nous avons eu de la famille dans une fruitière. 3. C’est une tranche de leur emmental aux trous magnifiques qui a créé la photocopie emblématique de l’exposition « Les Immatériaux » de 1985 (https://jlggb.net/blog8/2022/10/23/copier-vie-des-objets-ch-116/)
État des lieux
Jeudi 22 août 2024, 13h30, rue de Montreuil, Paris 11e. La ville « déserte » favorise les sorties de l’inaperçu ordinaire. On remarque cette vitrine sans produits mais avec, peut-être, des symboles, sous l’enseigne « États des lieux locatifs ». Reflet de la vitrine d’en face : « Estimation ». Quelle note lui mettre ? Nombre de plantes : une vingtaine ; variété : une douzaine ; rares : non ; composition : un certain équilibre mais dissymétrie banale — il n’est pas question d’ikebana — ; encadrement métallique et vis apparentes, solidité et frontalité assurées ; effet kitsch positif. Un peu mieux qu’assez bien : 13/20.