Juste une image

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Jeudi 2 avril 2015, 23h15. Sortie des essais de la presse typographique Tiflex et des caractères en matière plastique mêlée de métal eux aussi d’époque — il y a 40 ans —, une épreuve qui met en évidence la qualité de l’Univers 75. Qualité qui n’est pas dans une approche bien ajustée mais au contraire dans la façon qu’a cette typographie rustique, obsolète, d’assumer ses « défauts », de bien montrer sa fabrication. Ne voit-on pas les lettres danser ? Il faut encore savoir que cette typographie n’était déjà plus celle des imprimeurs mais celle d’une machine à fabriquer soi-même des pancartes, pour afficher des prix, pour une signalétique. Une épreuve à l’imprimante laser du même texte, dans la même police, a démontré en comparaison sa stupéfiante facilité et rapidité, mais aussi la froideur banale de son résultat. 1. Ceci est un couplet de la tendance actuelle à une rematérialisation couplée au DIY. 2. C’est au moment de sa radicalisation sous la bannière Groupe Dziga Vertov que Godard énonça — dans un carton de Vent d’est, en 1970 — cet aphorisme : « Ce n’est pas une image juste, c’est juste une image ». 3. Coïncidence marquante pour moi, c’est en 1967-1968 que j’eus l’occasion de croiser Adrian Frutiger, alors qu’il nous donnait son choix pour la typographie attachée à la Maison de la culture de Grenoble : Univers 67 (romain) et Univers 68 (italique). Voir : http://jlggb.net/blog/?p=2701

Un lieu

zaugg un lieu 2015
Samedi 28 février 2015, 15h, Centre culturel Suisse, Paris, 3e. Rémy Zaugg, série de peintures de petit format, alignées à hauteur d’œil autour de la salle, comportant les mots : UN À VENIR, UNE FOIS, UNE PRÉSENCE, PAS ENCORE, UNE IMAGE, LÀ, UN LIEU, PERSONNE, DEMAIN, RIEN, PEUT-ÊTRE, DU VIDE. Dans le documentaire vidéo de Claude Stadelmann, Rémy Zaugg, dont on commémore le dixième anniversaire de la mort, dit : « faire participer le fond à l’expression ». Sa femme Michèle Röthlisberger-Zaugg, qui prépare la typographie — toujours l’Univers 85 de Adrian Frutiger — avec une extrême attention, dit : « l’espace entre deux lettres, je me dis qu’il est trop grand, je me dis qu’il est trop petit, jamais de certitude ».

Fragment autobiographique n°2bis

1963 vox couv 2015
1963 vox univers 2015
Vendredi 16 janvier 2015, Paris. Il y a 50 ans jour pour jour, je recevais de mes parents, en cadeau d’anniversaire, le livre de Maximilien Vox, Cent alphabets ‘Monotypes’. Faisons le point, édité par l’Union bibliophile de France, imprimé — en typographie — par Draeger le 27 décembre 1963, 136 pages, format 19 x 27,5 cm. C’est un beau livre devenu un classique, il est entièrement reproduit sur le site de Peter Gabor, ici. Je me souviens avoir eu un peu de mal avec la « classification Vox » — Famille des caractères classiques : humanes, garaldes, réales; Famille des caractères modernes : didones, mécanes, linéales; Famille des caractères d’inspiration calligraphique : incises, scriptes, manuaires, fractures — mais elle m’est restée et je continue à l’utiliser pour une part. J’ai appris récemment, par une doctorante qui travaille sur la dimension graphique et typographique du cinéma de Godard, que Maximilien Vox était l’oncle de Godard. Rapprochement qui m’intéresse puisque Godard m’a marqué et me marque encore.