Mode d’existence



Jeudi 30 août 2019, 16h50, Tence, Haute Loire. Tence est une destination ancienne. Ce furent des vacances en famille l’été 1951, au village de Mendigoules, voir le 9 juillet 2009 : http://jlggb.net/blog/?p=4299. On sait maintenant que nous eûmes là des ancêtres. Mais, ce qui nous amène depuis la vallée du Rhône, c’est le nom de Gilbert Simondon que nous savons attaché à Tence. On a entendu que la maison de son grand-père était pour lui un ancrage dans la nature et dans l’enfance et qu’elle était restée la maison de sa famille. Un jeune homme, rencontré à la mairie, nous dit qu’en face de chez sa grand-mère, dans le hameau de Mazeaux, elle a des volets « bleu charrette ». La pensée de Simondon est un monde immense et étrange, où connaître une effervescence de mots et d’idées et goûter la compréhension. La forme, la relation, mots dont j’ai usé, sont chez Gilbert Simondon des « nœuds » d’un réseau qu’il annonce très tôt comme une réalité techno-scientifique propre à émerger en philosophie et en art. Lorsque j’ai cherché sur Google « Simondon » et « Tence », c’est « existence » qui est venu, celle du grand livre, touché et entendu cité, lu indirectement, depuis quarante ans : Du mode d’existence des objets techniques.
À lire, sa biographie par Nathalie Simondon : http://gilbert.simondon.fr/content/biographie. À écouter : https://www.franceculture.fr/emissions/avoir-raison-avec/avoir-raison-avec-gilbert-simondon

La rue Belle Image et ses noms


Jeudi 29 août 2019, 12h30, Valence, Drôme. Dans le quartier de l’école où je fus en 1954-1955, le nom de la Bonneterie Troyenne est resté associé pour moi aux noms arméniens de nombreux camarades, au nom de la rue Belle Image, modernité de la reconstruction — après le bombardement allié du 15 août 1944. Il est dit que le magasin fut ouvert en 1954. Il est étrange pour la mémoire de le voir resté identique.

Une sérigraphie d’Étienne-Martin


Mercredi 28 août 2019, 14h, Mamco, Genève. Étienne-Martin, sérigraphie de l’exposition à la galerie Givaudan, novembre 1967, une pièce de l’exposition dédiée à Claude Givaudan, galeriste, éditeur de livres, d’estampes, de multiples, organisée par Françoise Ninghetto. À partir de l’automne 1967 au moment de la Cinquième Biennale de Paris, je vois Frank Popper et son espace « art cinétique » et cette galerie, avec Takis, Piotr Kowalski, 201 boulevard Saint Germain, devient un point de repère pour mes voyages parisiens. [de la série de reproductions d’œuvres carrées pour Instagram]

Impression conique


Mercredi 28 août 2019, 10h49, rue Vignier, près de Plainpalais, Genève. La texture de la table permet d’en lire la perspective, ou encore de saisir l’espace horizontal dans ses distances. Le verre a la double qualité de sa transparence et de son cône, volume qui pointe. La note rappelle la puissance de l’impression sans expression, du code partagé par les chiffres et les lettres. Ainsi a lieu une transaction normée par une monnaie, le monument de nombres et de mots d’un moment partagé.

Soleils artificiels



Dimanche 25 août 2019, midi, rue d’Aligre, Paris 12e. Il arrive qu’on apprécie ou qu’on redoute les radiateurs infrarouge placés aux terrasses. On dit désormais que c’est un défaut écologique. Il est vrai que les diodes qui ont remplacé les filaments de tungstène des lampes à incandescence apportent une économie. Quand c’est une imitation d’ampoule ancienne, le décoratif peut se faire rappeler à l’ordre par le soleil.

Mordu !


Vendredi 23 août 2019, 20h20, boulevard Voltaire, Paris 11e. Un tableau de notre voisinage m’inspire une publication Instagram politiquement ironique. Si les vélos rejoignent le camp de Uber, ils flatteront le goût de l’indépendance individualiste au bénéfice d’une vie gouvernée par le code technologique monopolistique. Par hasard sans doute, les trois vélos du cliché sont des Jump et la voiture est un Uber. Le vélo électrique rouge criard mime un saut en longueur dans la terre, plate-bande qui aura ses plantes, promesse écologiste dérisoire d’un vert qui devrait gagner les villes.

Aux urgences


Mercredi 21 août 2019, 15h, magasin de téléphonie, rue du Faubourg Saint Antoine, Paris. Après la nuit passée à tenter de rétablir le fonctionnement de l’indispensable boîte en vie, l’examen par branchement total fait de la boutique une clinique. Comme aux urgences, il y a un panneau : « toute agression verbale ou physique envers le personnel donnera lieu à des poursuites ».

Métadonnées matérielles



Samedi 17 août 2019, 11h30, 93bis. La frontière entre métadonnées numériques (le sens dominant actuel) et métadonnées générales, matérielles, est floue. Si je note que ce duo crémier sucrier reçu aujourd’hui se nomme Campana et qu’il a été fabriqué pour Villeroy & Boch au Luxembourg, dans un grès émaillé garanti sans plomb, je cite ce qui est inscrit sur les objets. Que leur diamètre de 90 mm soit commun, ils peuvent s’empiler, apporte un nombre et une qualité mesurable. L’essentiel de l’opération qui les a conduits jusqu’ici est de nature numérique : catalogue en ligne eBay ; inscription dans la liste des favoris puis dans le panier d’achats ; décision en un clic de l’acquérir et de le payer ; attribution du numéro d’objet 352132829597 ; référence de l’e-mail #2c0e69b75619416f81e4857778a2cc1e# ; itinéraire et calendrier de suivi de la part des transporteurs avec code-barres ; Deutsche Post DHL puis Colissimo N°8K02089727830 ; etc. Des informations recherchées peuvent se rattacher à ce modèle : les Milchkännchen & Zuckerdose Campana sont de Ludwig Scherer, designer attaché à la fabrique luxembourgeoise. Le fini est ici d’un brun irisé minimal, mais la forme a été rendue populaire par le motif floral stylisé très coloré, inspiré d’un voyage au Mexique en 1967, nommé Acapulco, par Christine Reuter. L’étiquette du colis porte : from Ursula Hornung, Taunusstraße, 65779 Kelkheim, Germany. Un ensemble de métadonnées est porté par l’emballage : carton marqué Typ OP357D, innenmaße 315 x 220 x 220 mm ; la protection évite tout plastique, papier bulle et flocons de polystyrène, elle est seulement de papier kraft, 20 feuilles de format 74 x 49 cm, chacune pesant 29 g. Ces 580 g de papier sont comme un message écologiste. On se dit alors qu’un grand ensemble de métadonnées matérielles devrait être cherché : la terre de céramique provient d’où ; quelles ont été les conditions et les circonstances de la fabrication ; combien de tels objets ont été produits ; qui les possède aujourd’hui ; pourquoi sont-ils conservés ; peut-être collectionnés et entourés de quels autres objets ? Voir 17 mai 2019 http://jlggb.net/blog6/2019/05/17/metadonnees/