L’Ève du Parc de la butte du Chapeau-Rouge

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Dimanche 3 mars 2013, 12h30, Parc de la butte du Chapeau-Rouge, Paris 19e. La vision de cette statue a toujours éveillé chez nous un soupçon. C’est que, dans les années 70, nous avions vu à Stuttgart le parc Killesberg, ses constructions, ses terrasses, ses statues, en sachant qu’il avait été créé (sur d’anciennes carrières, comme ici) à la gloire de « de vie en plein air » et de « l’agriculture national-socialiste », au moment même du déclenchement de la guerre. D’après la documentation consultée aujourd’hui sur Internet, le principal architecte de ce parc était Hermann Mattern, qui s’occupa aussi des paysages autoroutiers de l’Allemagne nazie (plus tard il collabora avec le fondateur de la Documenta de Kassel, Arnold Bode), était « politiquement rouge », alors que certaines des constructions du parc étaient inspirées par Albert Speer. Le parc et l’exposition firent polémique et il semble que cette polémique s’est prolongée depuis, à la fois sur le plan historique et à l’occasion des transformations successives du Killesberg. Mais l’Ève de Raymond Couvègnes (1938) regarde résolument à gauche. L’architecte du Parc de la butte du Chapeau-Rouge était Léon Azéma, qui restaura les cascades du Parc de Sceaux et fut l’un des auteurs du Palais de Chaillot de 1937. Ouvert lui aussi en 1939, le parc, ses fontaines, ses terrasses, ses constructions et abris en béton armé avec de très longs bancs, ont des qualités démocratiques. Rien n’empêche cependant de trouver des parentés entre l’architecture nazie et celle du Front populaire et d’y reconnaître le style d’une époque, lié à des techniques, à des goûts, ou même à des idées politiques (faire du « social » par exemple). La butte du Chapeau-Rouge est en travaux (arrosage automatique et fontaines) et vient de recevoir une œuvre liée à la construction du tramway : Bert Theis, artiste luxembourgeois installé à Milan, curateur et activiste, a installé deux très grands bancs de bois peints en blanc qui remémorent le discours pacifiste prononcé par Jean Jaurès le 25 mai 1913, ici même au Pré Saint-Gervais, sur cette butte qui était encore la zone (on voit l’un d’eux au fond de la photo et on va le revoir au Mamco de Genève: http://jlggb.net/blog3/?p=5451).
Sur les œuvres du tramway T3 : http://jlggb.net/blog3/?p=5125

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25 mai 1913, Pré Saint-Gervais, discours de Jean Jaurès contre la loi de 3 ans de service militaire devant 150 000 personnes [cliché Roger Viollet]

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